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lors gouverneur de Paris, et qui aymoit fort mon père, l’en fit promptement délivrer, mais ce fut en faisant abjuration de la vérité, ce qui ne fut malaisé à luy faire faire parce qu’il n’avoit pas encores pensé à quitter la messe. Touteffois voyant qu’il ne pouvoit demeurer seurement à Paris, se délibéra de se retirer en sa maison de la Borde, où il passa tous les troubles. Monsr de Guise voulut faire surprendre sa maison et luy dedans, le traversa fort en ses biens. La cause de ceste hayne particulière, tant de monsr de Guise que du peuple de Paris, estoit des presches faitz en sa maison de Paris, et que, la première fois que monseigneur le Prince avoit fait la cène, auroit esté aux champs en sa maison de la Borde, où l’après-dinée monsr de Guise traversant les bois pour aller à Fontainebleau, monseigneur le Prince et luy se cuidèrent battre. Plus, que feu mon père avoit preste et fait prester par ses responces somme notable de deniers à monseigneur le Prince lequel ilz prétendoient estre sy nécessiteux que, s’il n’eust esté aidé de ses serviteurs, il n’eust eu moyen de se déffendre aux guerres qu’on lui commençoit, et l’eust on plus aysément ruyné comme ilz prétendoient.

Feu monsieur de la Borde, mon père, se voyant affligé pour la religion de laquelle touteffois il ne faisoit profession, recongneut la bonté de Dieu qui se servoit de ce moyen-là, et print peine de s’instruire, conférant avec les ministres, monsr Gaudet et monsr de Miremont qui se tenoient chez madame la marquise de Rothelin, à Blandy, à une lieue près de sa maison. Estant instruit, il fit profession publique de la vraye religion, et Dieu luy a faict la grâce d’y per-