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d’une fiebvre double tierce dont il avoit esté très mal, et qui luy estoit procédée des cholères qu’il avoit receues durant ceste prétendue conférence, et principalement pour l’extrême fascherie qu’il receut quand il vit monsieur du Plessis sy gravement malade, et non sans danger de sa vie.

Monsieur du Plessis se portoit assés bien, veu et sa maladie et ses fascheries, mais commençant touteffois à se sentir d’une défluxion sur les bras qui depuis le réduit à une diète et autres régimes dont il n’a encorres receu grand soulagement. Et luy fut, et à moy, grand plaisir de nous voir ; il estoit en appréhension que la colère du Roy ne me créast quelque desplaisir ; d’autant plus que tost après, M. de Villeroy eust copie du discours susdit, lequel fit entendre au Roy qu’il estoit préjudiciable à son service, et là dessus renouvellement de courroux. Le Roy donq, qui estoit sur son chemin de Lyon, s’en plaignoit à tous ceux qu’il voioit, menaceant de luy faire son procès là dessus, selon qu’on luy avoit exagéré la matière, et pis encor lorsqu’il sceut qu’il estoit imprimé et que le lieutenant civil luy en eut envoyé les copies ; mais la guerre de Savoye[1] qui s’enflamma et quelques soupçons de remuement au dedans luy firent estimer qu’il ne falloit pas aliéner du tout ceux de la Religion, tellement qu’ayant esté plusieurs fois délibéré sur ce qu’on avoit à res-

  1. La guerre déclarée le 11 août 1600, sur les retards du duc de Savoie qui n’avait point rendu le marquisat de Saluces, fut close par la paix de 1601 qui donnait au roi, en échange du marquisat de Bresse, le Bugey, le Valormey et le bailliage de Gex.