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plus part des depesches estrangères et escriptz publicq sortoient de sa main. Il y en a un dont il me souvient, qui, faict à propos de son jugement touchant ceste guerre, auquel il conclut, pour plusieurs raisons, quelques éditz de réunion qui se fissent entre le Roy et M. de Guise, qu’ilz ne seroient jamais unis de volontés, et par conséquent que leurs coups en seroient plus mal assurez et plus foibles, ce qui a paru en tout le fil de la guerre, et finalement en la mort du duc de Guise. Monsieur du Plessis avoit basty un dessein sur Thoulouse, et premier qu’en rien ouvrir au Roy de Navarre, le voulut luy mesmes aller reconnoistre, où il rencontra de grandes traverses. Arrivant un soir à une lieue de la ville avec dix chevaux, sans armes, une villete nommée St Geniz où il passoit, comme il fut dedans, prend alarme de luy, se met en armes et eut pene à gagner l’autre porte pour sortir. En la maison où il devoit repaistre se trouve arrivé le sr de Verdale, colonel de l’infanterie du mareschal de Joyeuse[1] et luy fallut passer outre. Le signal avoit esté donné de St Geniz par une barique allumée au clocher, tellement que tout le pays estoit en feu, les cors sonnans de toutes partz, les chemins assiégez. Nonobstant, ne pouvant rien reconnoistre pour ceste nuit-là, il passa jusques en Foix, où il fust très-bien receu en la maison de M. de Benergue, fils du feu Président de Mansencal, qui ne le connoissoit point, mais à l’adveu d’un de ceux qui estoient avec luy. Le lende-

  1. Anne, duc de Joyeuse, l’un des favoris de Henri III, né en 1561 ; il fut tué à la bataille de Coutras