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dit au sr du Ronday de Loudun, personnage notable qui estoit avec luy, que dans peu, ils seroient en extrême danger, mais qu’il s’asseuroit que Dieu les en délivreroit tous. Et le mesme soir, près de l’Isle Dieu, furent attaquez des vaisseaux du Roy et de ceux de la coste d’Aulonne qui les prirent, faillirent d’abordée à le tuer de coups d’espée, le mirent à nud et tous ses gens, en pendirent par les pieds aucuns, les plongeant en l’eau, attachés à une corde, faisans semblans de les noyer, et leur faisant diverses menaces pour leur faire dire qui il estoit ; mais, par la grâce de Dieu, ils tinrent tous serré[1], se ressouvenans de ce qu’il leur avoit commandé de dire qu’ilz estoient marchans. Et n’eut loisir, tant furent prévenus, que de jeter ses commissions, instructions, lettres et blancz en la pompe. Il eschappa au dit sr du Ronday, qui estoit avec luy, pressé rigoureusement de dire qui il estoit, de respondre en ces mots : « Je suis à Monsieur, » parlant de monsr du Plessis, qu’ilz remarquèrent bien et en fut en extrême danger. Un autre de ses gens, la dague sur la gorge, ne vouloit point bailler une ceinture qu’il avoit autour du corps, où y avoit huit cens escus ; mais enfin monsieur du Plessis la lui fit bailler, craignant qu’on ne l’outrageast. Il y avoit aussy quelques malles pleines d’habillements de soye qui témoignoient assez qu’il n’estoit pas marchant et ce qu’il pouvoit estre, mais Dieu ne voulust qu’ilz y prissent garde. Pour l’attirer en leur retz, luy estant enfermé en un coing, au bas du navire, ilz faisoient mine de le vouloir mener à

  1. Ferme.