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dans l’antre ténébreux du corps, et, par sa vie, son retour au sein des astres, après qu’elle a brisé ses liens ?

Chap. XI. Opinion des platoniciens sur les enfers et sur leur emplacement. De quelle manière ils conçoivent la vie ou la mort de l’âme.

Aux opinions que nous venons d’exposer, ajoutons celles de quelques philosophes, ardents investigateurs de la vérité. Les sectateurs de Pythagore, et ensuite ceux de Platon, ont admis deux sortes de morts : celle de l’âme et celle de l’animal. L’animal meurt quand l’âme se sépare du corps, et l’âme meurt lorsqu’elle s’écarte de la source simple et indivisible où elle a pris naissance, pour se distribuer dans les membres du corps. L’une de ces morts est évidente pour tous les hommes, l’autre ne l’est qu’aux yeux des sages, car le vulgaire s’imagine qu’elle constitue la vie : en conséquence, beaucoup de personnes ignorent pourquoi le dieu des morts est invoqué, tantôt sous le nom de Dis (dieu des richesses), et tantôt sous celui d’implacable. Elles ne savent pas que le premier de ces noms, d’heureux augure, est employé, lorsque l’âme, à la mort de l’animal, rentre en possession des vraies richesses de sa nature, et recouvre sa liberté ; tandis que le second, de sinistre augure, est usité, lorsque l’âme, en quittant le séjour éclatant de l’immortalité, vient s’enfoncer dans les ténèbres du corps, genre de mort que le commun des hommes appelle la vie : car l’animation exige l’enchaînement de l’âme au corps. Or, dans la langue grecque, corps est synonyme de lien, et a beaucoup d’analogie avec un autre mot qui signifie tombeau de l’âme. C’est pourquoi Cicéron, voulant exprimer tout à la fois que le corps est pour l’âme un lien et un tombeau, dit : « Ceux-là vivent, qui se sont échappés des liens du corps comme d’une prison, » parce que la tombe est la prison des morts.

Cependant les platoniciens n’assignent pas aux enfers des bornes aussi étroites que nos corps ; ils appellent de ce nom la partie du monde qu’ils ont fixée pour l’empire de Pluton, mais ils ne sont pas d’accord sur les confins de cet empire : il existe chez eux, à ce sujet, trois opinions diverses. Les uns divisent le monde en deux parties, l’une active et l’autre passive ; la partie active, où tout conserve des formes éternelles, contraint la partie passive à subir d’innombrables permutations. La première s’étend depuis la sphère des fixes jusqu’à celle de la lune exclusivement ; et la seconde, depuis la lune jusqu’à la terre. Ce n’est que dans la partie active que les âmes peuvent exister ; elles meurent, du moment où elles entrent dans la partie passive. C’est donc entre la lune et la terre que se trouvent situés les enfers ; et, puisque la lune est la limite fixée entre la vie et la mort, on est fondé à croire que les âmes qui remontent du globe lunaire vers le ciel étoile commencent une nouvelle vie, tandis que celles qui en descendent cessent de vivre. En effet, dans l’espace sublunaire, tout est caduc et passager ; le temps s’y mesure, et les jours s’y comptent. La lune a reçu des physiciens le nom de terre aérienne, et ses habitants celui de peuple lunaire ; ils appuient cette opinion sur beaucoup de preuves, qu’il serait trop long de rapporter maintenant.