Page:Machiavel - Oeuvres littéraires - trad Peries - notes Louandre - ed Charpentier 1884.djvu/448

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
436
LETTRES FAMILIÈRES

quia opposita juxta se posita magis elucescunt, ils ne peuvent s’empêcher de reconnaître la méchanceté des pervers et la simplicité des bons ; ils se rapprochent donc de ces derniers, et s’éloignent des premiers avec empressement ; car naturellement chacun fuit volontiers le mal pour suivre le bien ; et voilà pourquoi dans l’adversité le nombre des méchants diminue et celui des bons multiplie ; et ideo quanlo maqis, etc. Je me bornerai à vous exposer le reste en peu de mots, car la brièveté épistolaire ne me permet pas de m’étendre longuement. Il aborda donc ensuite une foule de sujets, suivant sa coutume ordinaire, afin d’affaiblir le plus qu’il pourrait ses adversaires ; et dans le dessein de trouver une transition à son prochain discours, il dit que nos discordes pourraient donner naissance à un tyran qui ruinerait nos maisons et ravagerait nos villes : que ce qu’il annonçait n’était pas en contradiction avec ce qu’il avait déjà prédit ; que Florence devait être heureuse, et étendre sa domination sur toute l’Italie, car ce tyran ne régnerait que peu de temps, et finirait bientôt par être chasse. C’est ainsi qu’il termina sa prédication.

Le matin suivant il continua à parler sur l’Exode à ses auditeurs. Lorsqu’il en vint à ce passage où il est dit que Moïse tua un Égyptien, il s’écria que l’Egyptien représentait les méchants, et Moïse, le prédicateur qui les tue en découvrant leurs vices : « O Égyptien ! dit-il, je « veux te donner un coup de poignard » Et il commença alors à déchirer vos livres et vos prêtres, et à vous traiter de manière que les chiens n’en voudraient pas manger. Il ajouta ensuite, et c’est là principalement qu’il voulait en venir, qu’il prétendait faire a l’Égyptien une autre grande blessure. Et il annonça que Dieu lui avait dit qu’il existait dans Florence un homme qui cherchait à usurper la tyrannie, qui intriguait et cabalait pour réussir, et que vouloir chasser le frère, excommunier le frère, persécuter le frère, ne signifiait autre chose sinon que nous voulions faire un tyran, mais que l’essentiel était d observer les lois. Il en dit tant enfin, que pen-