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APPENDICE.

impériale. Louis trouva dans Castruccio son conseiller le plus fidèle et son plus ferme appui. Pour le récompenser, il érigea en duché les Etats qu’il gouvernait, savoir Lucques, la Lunigiane, Pistoja, et Volterra ; et il lui fournit l’occasion de soumettre aussi bientôt après la republique de Pise. Il emmena Castruccio à Rome avec lui ; il le créa chevalier et comte du palais de Latran, afin de recevoir de lui, à son couronnement, l’epée de l’empire. Il lui transmit ensuite la dignité de sénateur de Rome, dont il avait d’abord consenti à se revêtir lui-même. Mais, au milieu de tant de gloire, Castruccio fut averti que la ville de Pistoja lui avait été enlevee par les Guelfes le 27 janvier 1328. Il partit aussitôt pour la recouvrer : il en entreprit le siège, qui fut soutenu par les habitants avec la valeur la plus opiniâtre. Castruccio déploya plus que jamais dans cette occasion la supériorité de ses talents militaires : il réduisit à l’inaction une armée bien plus forte que la sienne, que les Florentins envoyaient contre lui pour le forcer à lever le siège. Il prit enfin Pistoja le 3 août 1328 ; mais les fatigues auxquelles il s’etait livre sans relâche lui causèrent une pleurésie, dont il mourut le 3 septembre de la même année. Il laissait trois fils légitimés encore en bas âge, et un bâtard. Presque tous périrent misérablement. La principauté qu’il avait fondée fut détruite ; ses fils, chasses de toutes les villes où il avait dominé, furent poursuivis dans les montagnes comme des bêtes féroces. Les Florentins, qu’il avait combattus pendant toute sa vie, s’agrandirent de toutes les conquêtes qu'il avait faites, et Lucques, sa patrie, expia sa gloire passagère par quarante-deux ans de servitude sous des maîtres étrangers. Machiavel a fait, sous le nom de Vie de Castruccio, une espèce de roman où il ne faut chercher aucune vérité historique. D’autres ont défigure davantage encore son histoire, en parlant de tendresse pour Paul Guinigi, qu’ils disent son successeur, et des conseils qu’il lui donna en mourant. Paul Guinigi, chef des Guelfes de Lucques, fut élevé à la souveraineté de cette ville en 1400, par le parti le plus opposé è Castruccio ; et il mourut dans la force de l’âge, en 1432, cent quatre ans après celui dont on prétend qu’il fut l’élève.

(Article de M. Sismondi, extrait de la Biographie universelle, tome VII, page 855 et suiv.)