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moines furent sans vertu ; et le roi, ayant eu connaissance de Giov. Matteo, l’envoya chercher à Florence. Notre homme, étant arrivé à Naples, après quelques feintes cérémonies guérit la jeune princesse. Mais Roderigo, avant de s’éloigner, dit à Giov. Matteo : « Tu vois bien que j’ai tenu ma promesse de t’enrichir ; maintenant que je me suis acquitté, je ne te dois plus rien. En conséquence, je te conseille de ne plus paraître devant moi ; car autant je t’ai fait de bien, autant par la suite je pourrais te faire de mal. »

Giov. Matteo retourna donc à Florence extrêmement riche, car le roi lui avait donné plus de cinquante mille ducats, et il ne pensa plus qu’à jouir en paix de ses richesses, ne pouvant croire que Roderigo pensât jamais à lui faire tort. Mais cette idée fut bientôt troublée par le bruit qui se répandit qu’une des filles du roi de France Louis VII était devenue possédée. Cette nouvelle bouleversa l’esprit de Giov. Matteo, quand il vint à penser à la puissance d’un aussi grand roi, et aux menaces que Roderigo lui avait faites. En effet, le roi, n’ayant pu trouver de remède au mal de sa fille, et ayant eu connaissance de la vertu que possédait Giov. Matteo, l’envoya d’abord chercher simplement par un de ses huissiers ; mais Giov. Matteo ayant prétexté quelque indisposition, le roi fut obligé de recourir à la seigneurie, qui contraignit Giov. Matteo à obéir.

Ce dernier se rendit donc à Paris tout chagrin, et exposa au roi qu’il était bien vrai qu’il avait guéri autrefois quelques possédées, mais que ce n’était pas une raison pour qu’il sût ou qu’il pût les guérir toutes ; qu’il s’en trouvait dont le mal était d’une nature si maligne, qu’elles ne craignaient ni les menaces, ni les exorcismes, ni la religion même ; que toutefois il était prêt à faire son devoir, mais qu’il le priait de lui pardonner s’il ne parvenait à réussir. Le rot irrité lui répondit que s’il ne guérissait pas sa fille, il le ferait pendre. Cette menace épouvanta Giov. Matteo, qui, ayant fait venir la possédée en sa présence, s’approcha de son oreille et se