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10 LA MANDRAGORE. CALLTMACO. Ce ne sont pas tes conseils que je te demande en te faisant cette confidence, mais quelque soulagement à ma peine : prépare-toi donc à m’aider quand l’occasion se présentera. SIRO. J’y suis on ne peut plus disposé. Mais quelle espé¬ rance avez-vous ? CALL1MACO. Hélas ! je n’eo ai aucune, ou bien peu. D’abord je te dirai que son naturel, qui est l’honnêteté même, et qui n’entend rien aux intrigues d’amour, combat contre moi ; en second lieu, elle a un mari très riche, qui se laisse entièrement gouverner par elle. S’il n’est plus de la première jeunesse, il n’est pas non plus tout à fait aussi vieux qu’il le paraît. De plus, elle n’a ni parent ni voisin chez lesquels elle aille en fête ou en veillée ; elle ne se livre à aucun des autres amusements qu’aime tant la jeunesse ; nul artisan ne met jamais le pied chez elle ; elle n’a ni servante ni valet qu’elle ne fasse trembler ; de sorte qu’il n’y a point là de place pour la séduction. SIRO. Que voulez-vous donc faire ? CALLIMACO. Rien n’est jamais si désespéré que quelque porte ne reste ouverte à l’espérance, toute faible ou tout illusoire qu’elle soit ; et le désir et la ferme résolution que l’on a de réussir dans une entreprise ne permettent pas de croire qu’elle puisse échouer. SIRO. Enfin, quel peut être le motif de votre espoir ? CALLIMACO. Deux choses : l’une est la simplicité de messer Nicia, qui, bien que docteur, est cependant l’homme le moins avisé et le plus imbécile de tout Florence ; l’autre, l’ex¬ trême désir qu’ils ont tous deux d’avoir des enfants ; car, depuis six ans qu’ils sont mariés, ils n’en ont point en¬