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male, en sortit professeur, et s’en alla enseigner la philosophie à Albi, puis à Toulouse. Mais, déjà, Jaurès s’orientait tout doucement vers le socialisme. Il fut élu, cependant, en qualité de républicain modéré, mais ferme. C’est à cette époque qu’il se risqua timidement vers les bureaux de la Revue Socialiste de Benoît Malon. Il ne reçut pas un accueil enthousiaste. Il se présentait d’ailleurs gauchement, timidement. Cette déconvenue ne l’éloigna nullement du socialisme.

Battu aux élections suivantes, il se présenta au doctorat avec deux thèses dont l’une fit scandale. Elle traitait des origines du socialisme allemand. Désormais, sa destinée était fixée. Le socialisme l’attirait irrésistiblement. Il n’hésite plus à donner son adhésion publique. Et le voilà de nouveau député, élu par Carmaux.

Alors ce sont les conférences, les meetings, les interventions bruyantes à la Chambre. Il apparaît comme un des chefs du parti, à côté des Jules Guesde et des Vaillant. Il est le leader de La Petite République. Il chante la Carmagnole et, comme on le dénonce à la Chambre, il fait remarquer, en riant, que cette vieille chanson est du fabuliste Florian. Puis, un beau jour, il plaide en Cour d’Assises pour Gérault-Richard qui avait injurié le président Casimir-Perier. Batailles sur batailles. Cela nous mène à l’inoubliable Affaire.

La gloire de Jaurès, ce sera de n’avoir aucunement tergiversé et de s’être rangé, dès la première heure, à côté d’Émile Zola. C’est à ce moment que nous, je veux dire les hommes de ma génération, l’avons approché, connu, apprécié. Depuis l’Affaire Dreyfus, mon culte pour le grand tribun ne s’est pas épuisé. Non que je fusse complètement d’accord avec lui. Dans La Guerre Sociale, du camarade Gustave Hervé, nous lui cherchions assez souvent querelle. Nous l’estimions trop modéré, « petit