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mense talent d’orateur, sa voix claironnante qui dominait les interruptions et, surtout, l’allure frondeuse, gouailleuse, de ses discours.

Mais un de ses discours les plus remarquables fut, précisément, celui qu’il prononça à propos de la fameuse Affiche Rouge (comme quoi on peut voir que ces souvenirs à bâtons rompus ont un lien étroit avec l’histoire du mouvement socialiste d’avant-guerre). Ribot, le long Ribot, défenseur de l’ordre, se leva et somma Marcel Sembat d’indiquer clairement son opinion. Et Sembat n’hésita pas une seconde à déclarer qu’il approuvait le conseil donné aux conscrits. Et, pour la première fois, on entendit au Palais-Bourbon, devant un ramassis d’acéphales désemparés, discuter la noble et sainte idée de Patrie.

Une telle attitude, on le conçoit, risquait de compromettre la réélection de Sembat. Bah ! il n’en persista que mieux dans son hérésie. Il fit imprimer son discours qu’on répandit par milliers parmi les électeurs. Résultat : réélection triomphale. À cette époque admirable, l’

la sincérité étaient des vertus appréciées par les foules.

Je ne suivrai point, pas à pas, la carrière (j’allais dire la Grande Carrière) de Sembat. Encore une fois, je ne prétends point faire œuvre d’historien méticuleux, mais simplement, au hasard de la fourchette, piquer des anecdotes, faire jaillir de menus faits oubliés, en un mot retracer la petite histoire (qui est souvent la plus vraie) des hommes et des événements.

J’ai résumé, rapidement, la vie politique et intellectuelle de Sembat. Un autre, plus autorisé que je ne le suis,