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Marcel Sembat


Ce fut au cours d’une de mes réunions de propagande (voici des années, hélas !) que j’eus l’occasion de lier connaissance avec Marcel Sembat. Nous avions décidé, à quelques-uns, une grande démonstration à propos du départ des conscrits pour la caserne (car tout se passait alors comme de nos jours ; les cadets ne font que répéter les gestes des aînés). Nous cherchions les orateurs capables de « faire le plein » à la salle Saint-Isaure, classique à Montmartre. Liard-Courtois me dit :

— Va voir Sembat. Il marchera sûrement. Puis nous nous occuperons de Clovis Hugues.

Avec Sembat, ce fut très simple. Je lui écrivis. Il accepta, par retour du courrier, de prendre la parole. Mais, avec le poète-député (il représentait le dix-neuvième arrondissement), ce fut une autre histoire.

Nous allâmes le trouver, à quelques-uns, dans une brasserie du boulevard Rochechouart où il avait accoutumé de déguster son pernod. Je connaissais déjà ce barde chevelu ; il était des intimes de mon père et mon compatriote. Je savais alors ses vers par cœur (je les avais appris bien jeune) et je récitais volontiers :


Où t’en vas-tu, bon ouvrier
Sur ton bâton de cornouiller ?


S’il faut tout dire, ses poèmes n’étaient pas plus mauvais qu’autre chose. Il y avait un certain souffle romantique, qui se combinait à une jolie préciosité. Ça valait