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tion sphérique et chromatique, puisse s’être formé par élection naturelle[1]. » Cependant, il ne se décourage pas, et pourvu qu’on lui accorde qu’un nerf peut être sensible à la lumière, il croit possible d’arriver, par degrés successifs, de ce modeste point de départ à l’œil le plus parfait. Or, c’est en quoi son entreprise est visiblement chimérique. Il a beau décrire les différents systèmes d’appareils visuels qu’offrent les divers embranchements du règne animal, entre le nerf sensible à la lumière et l’œil le plus simple il y a un intervalle brusque où on ne saurait placer d’intermédiaire. Car l’œil le plus simple est déjà un très-parfait instrument d’optique, et le nerf susceptible d’être ébranlé par les ondulations lumineuses, n’a rien absolument qui offre ce caractère. M. Darwin commence par chercher dans la nature qui nous présente tous les degrés de l’organisation, quelque trace des transitions qu’elle devrait offrir entre ces deux extrêmes, si elle passait réellement de l’un à l’autre. Puis il s’aperçoit qu’il cherche en vain ; il reconnaît que les intermédiaires manquent, et finalement il comble l’intervalle à force de suppositions arbitraires qui le font entrer à pleines voiles dans la doctrine du hasard, dernier mot, en effet, de toutes les théories qui ne veulent point expliquer par l’intelligence les œuvres de l’intelligence.

  1. Darwin, p. 271.