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pouvons admettre que ce procédé, continué durant des siècles, modifierait quelque race que ce fût en l’améliorant[1].

Or le fait des différences accidentelles entre les individus se rencontre dans les espèces sauvages aussi bien que dans les espèces domestiques ; et, selon M. Darwin, il y est le point de départ d’une élection naturelle dont les résultats sont bien autrement profonds. Sans doute la nature est aveugle, et ce n’est que par métaphore qu’on peut lui prêter l’intention de modifier les espèces en accumulant les différences. Mais ce qu’elle n’obtient pas par dessein et par volonté, elle l’obtient par l’action d’une loi nécessaire dont M. Darwin a fait la clé de voûte de son édifice scientifique et qu’il appelle la lutte pour la vie ou concurrence vitale (struggle for life). La nature, dit-il avec vérité, produit dans chaque espèce beaucoup plus d’individus qu’elle n’en peut nourrir. Les êtres organisés tendent à se multiplier suivant une progression très-rapide ; il en naît beaucoup plus qu’il n’en vivra, et la loi de Malthus s’applique dans toute sa rigueur au règne organique tout entier, sans qu’il existe ici, suivant la remarque spirituelle de notre auteur, aucun moyen artificiel d’accroître les subsistances, ni aucune abstention prudente dans les mariages[2]. C’est donc à qui saura le mieux

  1. De l’origine des espèces, p. 58.
  2. Ib. p. 94.