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qui ne voient dans les merveilles de l’organisation animale que des produits du temps, des besoins, des habitudes ou des circonstances ? Examinons comment ces théories posent le problème qu’elles croient avoir résolu. Le voici dans les seuls termes qui marquent nettement leur esprit et leur caractère : « On supposera que ce qui est n’est pas, c’est-à-dire que Dieu qui est le principe de l’ordre du monde n’en est pas le principe ; et l’on cherchera comment on pourrait s’y prendre pour expliquer sans lui cet ordre qui vient de lui. On a déjà une explication vraie, certaine, démontrée ; on feindra qu’elle fait défaut, et l’on essayera de la remplacer par une autre. » La science qui pose dans ces termes et dans cet esprit la question du monde ne ressemble-t-elle pas à un homme qui se dirait : « J’ai deux jambes, et ces deux jambes me donnent la solution pratique du problème de la marche. Je ferai abstraction d’elles ; et feignant que je ne les ai pas, je chercherai si je ne pourrais pas résoudre autrement le problème, par exemple en marchant sur les mains. » Encore cette image est-elle fort incomplète ; car il pourrait absolument se faire que nous perdissions l’usage de nos jambes et que nous nous trouvassions bien d’avoir appris à marcher la tête en bas. Il ne se peut pas au contraire que l’idée de la Providence cesse de contenir l’explication vraie du problème de l’ordre naturel, et il est parfaitement vain de se procurer une solution de rechange dont en aucun cas possible on n’aura que faire.