Page:Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1864.djvu/285

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 157 —

sommes libres, nous savons bien qu’il y a une distinction entre le vice et la vertu, nous savons bien que le principe de causalité, pour être une loi ou, s’il plaît à Kant, une forme de notre esprit, n’en est pas moins une loi des choses et une vérité absolue. De dire que tout cela est purement subjectif, c’est se moquer du bon sens, et de plus (j’en demande bien pardon à la critique de la raison pure), c’est être mauvais psychologue ; car c’est ne pas voir que l’objectivité est le caractère essentiel des vérités de la raison. Vous avez à bon droit refusé de les rapporter à l’expérience parce qu’elles sont conçues comme éternelles, absolues, universelles et nécessaires. Or tout cela veut dire objectif. Une vérité éternelle, c’est une vérité qui existe avant moi, et par conséquent hors de moi ; une vérité absolue, c’est une vérité qui ne dépend ni de ma constitution intellectuelle, ni de celle d’aucun être créé ; une vérité universelle, c’est une vérité qui s’impose à tout être pensant quelque planète qu’il habite ; une vérité nécessaire, c’est une vérité que personne ne peut nier sans tomber dans l’absurde, et qu’aucune réalité ne peut démentir, parce qu’en la démentant, elle cesserait non pas seulement d’être réelle, mais encore d’être possible. Et vous, après leur avoir reconnu psychologiquement tous ces caractères, vous venez les détruire en disant que ces vérités sont subjectives, c’est-à-dire que ces vérités éternelles sont périssables, que ces vérités absolues