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connue ? Pour ma part, je me rattache de grand cœur à cette pensée consolante, et je veux croire que Socrate est arrivé à ce terme divin qu’il saluait en un si noble langage lorsqu’il disait, avant de boire la ciguë : Ô mes amis ! faisons tout pour acquérir en ce monde la sagesse et la vertu, car ce combat est beau, et l’espérance est grande.

J’ai besoin d’ailleurs de croire au salut de Socrate pour oser vous faire le récit — appelez le un mythe, si vous voulez, — qui va l’amener devant vous et vous préparer à l’entendre.


Il y a quelque temps, un certain homme qui, depuis une vingtaine d’années, passait sa vie à s’occuper de philosophie, terminait, à une heure assez avancée de la soirée, une lecture qu’il avait commencée non pas précisément pour son plaisir, mais pour son instruction et pour celle de quelques amis avec lesquels il aimait à causer métaphysique. Nous l’appellerons Philalèthe, du nom que Leibnitz donne à l’un des deux interlocuteurs de ses Nouveaux essais sur l’entendement humain. Il lisait, tantôt notant d’un coup de crayon les passages obscurs qu’il faudrait éclaircir, tantôt transcrivant les formules où la pensée de l’auteur se dessinait avec un relief plus puissant. Vers minuit, — était-ce la faute du coin du feu, ou de l’heure, si propice cependant aux