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L’Inde à la Comédie-Française
et à la Comédie-Italienne en 1770.

Il semble que de 1750 à 1770 les littérateurs français se soient intéressés à l’Inde. Il n’y a guère lieu de s’en étonner : c’était le temps des luttes diverses où se faisaient connaître Dupleix et La Bourdonnais, Godeheu et Lally-Tollendal. Voltaire, en 1750, publie la Lettre d’un Turc sur les fakirs et sur son ami Bababec ; en 1756, il écrit le Dialogue d’un Brachmane et d’un Jésuite, sur la nécessité de l’enchaînement des choses. En 1769 — l’année même où étaient abolis les privilèges de la Compagnie des Indes Orientales — il donne les Lettres d’Amabed, petit roman où les aventures tragi-comiques d’un Indou et de sa femme servent à railler les manières des inquisiteurs portugais et les mœurs du clergé romain. Diderot, dans l’Encyclopédie, avait écrit quelques articles sur la religion et la philosophie de l’Inde. En 1770, paraît l’Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes, de l’abbé Raynal, vaste compilation à laquelle avaient collaboré Diderot, d’Holbach, Naigeon et beaucoup d’autres écrivains : Raynal n’avait guère fait que mettre en un ordre confus des documents recueillis au hasard et des morceaux que lui avaient donnés ses amis. Et c’est encore en 1770 que, pour la première fois, nous voyons des auteurs dramatiques mettre à la scène des Indous, leurs contemporains : le 30 juillet, la Comédie-Française donnait pour la première fois La Veuve du Malabar, tragédie de Lemierre, et, le 13 novembre, on représentait devant la Cour, à Fontainebleau, une comédie nouvelle de Favart, L’Amitié à l’épreuve : la comédie était mêlée d’ariettes, dont Grétry avait composé la musique ; le 17 janvier 1771, elle fut jouée par la Comédie-Italienne. La scène de La Veuve du Malabar