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RIENZI.

d’eux fit une humble révérence, mais changea de couleur en recevant l’invitation.

« Mon cher seigneur Savelli, dit Orsini, tout tremblant lui-même, conduisez-vous donc plus bravement. Il faut avoir l’air de prendre la chose pour un honneur et non pour une vengeance. Je suppose que vous venez de recevoir le même avis que moi ?

— Il… il… m’in…, m’invite à… souper au Capitole, à une réunion d’amis (le diable soit de son amitié), après tout le tapage de la journée…

— C’est précisément comme moi ! » dit Orsini, se tournant vers un des Frangipani.

Ceux qui avaient reçu ce message quittèrent bientôt la fête, et réunis en un seul groupe, délibérèrent avec vivacité. Quelques-uns proposaient de fuir ; mais fuir, c’était s’avouer coupables ; leur nombre, leur rang, leur impunité longue et consacrée les rassurèrent, et ils résolurent d’obéir. Le vieux Colonna, le seul baron qui fût innocent parmi les hôtes ainsi invités, fut aussi le seul qui refusa de s’y rendre. « Bah ! dit-il d’un ton bourru, voilà bien assez de festins comme cela pour un jour ! Dites au tribun qu’avant qu’il se mette à table pour souper, j’espère bien être dans mon lit. Des têtes grises comme moi ne résisteraient pas longtemps à cette fièvre de réjouissances. »

Comme Rienzi se levait pour partir, ce qu’il fit de bonne heure, car le banquet avait eu lieu avant la fin de la matinée, Raymond, impatient de s’échapper pour s’entendre avec quelques-uns de ses amis ecclésiastiques sur le rapport qu’il ferait au pape, commençait à faire ses adieux, lorsque l’impitoyable tribun l’interrompit gravement :

« Monseigneur, nous avons besoin de vous au Capitole, pour affaire urgente. Un prisonnier, un jugement, peut-être, ajouta-t-il avec un froncement de