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RIENZI.

voir d’étendre ou de restreindre les bornes des villes et des provinces, puis, remarquez ceci, seigneurs ! d’élever des hommes au rang de ducs et de rois, oui, ainsi que de les déposer ou de les dégrader, de faire et de défaire des cités, en somme, tous les attributs de la puissance impériale. Oui, à l’empereur était confiée cette vaste autorité ; mais par qui ? Prenez garde, écoutez, je vous prie, n’en perdez pas un mot. — Par qui vous dis-je ? Par le sénat romain ! — Quel était le sénat romain ? Le représentant du peuple Romain ! »

« Je savais qu’il en viendrait là ! dit le forgeron, placé à la porte avec ses compagnons, mais dont l’oreille ne perdait pas un son de la voix claire, distincte, argentine de Rienzi.

— Le brave homme ! et encore il vous dit ça à la face des nobles qui l’entendent.

— Hein ! vous voyez ce qu’était le peuple ! et nous ne l’aurions jamais su sans lui.

— Paix, camarades ! dit l’officier à ceux de la foule qui se chuchotaient ces remarques. »

Rienzi continuait :

« Oui, c’est le peuple qui confiait ce pouvoir, c’est donc au peuple qu’il appartient. Le fier empereur s’arrogeait-il la couronne ? Pouvait-il de lui-même assumer l’autorité ? L’avait-il de naissance ? La tirait-il, seigneurs barons, de la possession de châteaux crénelés, ou d’une superbe descendance ? Non, tout-puissant comme il l’était, il n’avait pas droit à un atome de ce pouvoir, si ce n’est par la voix et la confiance du peuple Romain. Telle, ô mes compatriotes, telle était, même à cette époque où la liberté n’était que l’ombre d’elle-même, de ce qu’elle avait été jadis, telle était la prérogative reconnue de vos pères ! Tout pouvoir était un don du peuple. Qu’avez-vous à donner aujourd’hui ? Qui donc, qui donc, vous dis-je, quel particulier, quel petit chef vous demande l’autorité qu’il