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RIENZI.


CHAPITRE III.

Situation d’un patricien aimé du peuple en temps de mécontentement populaire. — Scène du Latran.

La position d’un patricien qui aime loyalement le peuple est, dans ces mauvais jours où le pouvoir opprime, où la liberté se débat, quand les deux partis qui divisent une nation luttent l’un contre l’autre, la position la plus pénible et la plus embarrassante que la destinée puisse lui réserver. Se rangera-t-il du côté des nobles ? il trompe sa conscience ! du côté du peuple ? il déserte ses amis ! Mais cette seconde alternative n’est pas la plus cruelle peut-être pour un esprit énergique. Tous les hommes sont gouvernés et enchaînés par l’opinion publique, c’est le juge universel ; mais l’opinion publique n’est pas la même pour tous les rangs. L’opinion publique qui excite ou effraye le plébéien, est l’opinion des plébéiens, de ceux qu’il voit, qu’il rencontre, qu’il connaît, de ceux avec lesquels il est mis en contact, de ceux avec lesquels il est mêlé dès l’enfance, dont les louanges se font entendre tous les jours, dont le blâme le menace à chaque heure[1]. De même l’opinion publique, pour les grands

  1. Il en est de même dans les petites fractions de la société. L’opinion publique est pour des avocats celle des avocats, pour des soldats celle de l’armée, pour des savants celle du monde littéraire et scientifique. Parmi ces derniers, les plus susceptibles ont été plus sensibles à la censure d’un docteur qu’à la réprobation la plus sévère