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Un jour qu’il se promenait par ses champs, il aperçut sur la grande route qui les traversait une charrette embourbée, et un homme qui criait et battait ses chevaux à grands coups de fouet. Il s’approcha pour l’aider à relever sa charrette, et reconnut avec étonnement que ce charretier embourbé n’était autre que son compère l’Ankou. La charrette était remplie de vieux vêtements en lambeaux et usés jusqu’à la corde.

— Quand donc viendras-tu me voir chez moi ? lui demanda l’Ankou.

— J’ai bien le temps ; attendez encore un peu, compère. Mais que signifie toute cette cargaison ? Est-ce que vous vous êtes fait pillaouer (chiffonnier) ?

— J’ai usé tous les vêtements que voilà à courir après toi.

— Eh bien ! quand vous en aurez usé encore autant, peut-être songerai-je à aller vous voir chez vous.

Un des chevaux maigres de l’Ankou avait la foire et salissait les chemins partout où il passait.

— Eh ! compère, empêchez donc votre cheval de salir ainsi mes routes, lui dit ironiquement l’ex-médecin.

— Et comment le ferai-je ? Fais-le toi-même, si tu peux.

— Attendez ! attendez ! vous allez voir.