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— Décamper, sur-le-champ ; n’as-tu rien à me donner ? car je n’ai pas le sou.

— Mon pauvre ami, je n’ai qu’un seul sou, une chique de tabac et un morceau de pain de munition.

— Donne, c’est toujours autant.

Les deux amis se firent leurs adieux, et Iann partit.

Le lendemain, après le coucher du soleil, il s’arrêta, harassé de fatigue, dans une auberge, au bord de la route, et demanda à manger et à loger.

Il mangea et but, à discrétion, et dormit dans un excellent lit. Le lendemain matin, il déjeuna encore, puis, il demanda son compte.

— C’est quinze francs, lui dit l’hôtelier.

Voilà notre homme bien embarrassé ; comment faire ? Enfin, après bien des hésitations, il se décida à avouer son cas, et il conta toute son aventure à l’hôtelier.

— N’est-ce que cela ? lui dit celui-ci : moi aussi, j’ai été à l’armée, et je sais ce que c’est que la vie de soldat ; plus d’une fois, je me suis trouvé dans le même cas que vous. Ne vous inquiétez donc pas, pour si peu. Plus tard, si vous devenez riche, un jour, vous me paierez ; en attendant, trinquons ensemble à votre bonne chance.

Et ils trinquèrent et burent ensemble, puis,