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aucun mal, garderont le silence sur ce qui vient de se passer, n’est-ce pas ? dit-il, en s’adressant aux personnes qui s’étaient attroupées autour de lui.

— Certainement, répondit-on de tous côtés, car son intention n’était pas de tuer votre mère.

— Mille écus, mon Dieu ! s’écria l’homme au penn-bâz ; il me faudrait, pour pouvoir les payer, vendre tout ce que je possède et réduire ma femme et mes enfants et moi-même à la mendicité.

— Il me les faut, et tout de suite, répondit le Moine impitoyable, ou il n’y a que la corde pour vous.

Le pauvre potier emprunta de l’argent et paya. Puis, le Moine acheta un cercueil, y déposa sa mère, paya bien le curé, qui chanta pour elle un beau service, et la vieille fut enterrée, dans le cimetière de Pontrieux, comme étant morte naturellement, ce qui était vrai, du reste, et il n’en fut plus question.

Le petit Moine s’en retourna alors à Bégard, avec son cheval aveugle, et ses mille écus en poche. Le grand Moine lui demanda, sitôt qu’il le vit :

— Eh bien ! comment était le marché aux vieilles femmes ? lui demanda le grand Moine.

— Excellent, ma foi !

— Qu’avez-vous eu de votre mère ?

— Mille écus,

— Mille écus ! ce n’est pas possible !