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le père sera obligé de croire ce que vous lui direz de la mauvaise conduite de sa fille.

La méchante s’en retourna avec le gâteau de la sorcière, et dit à Annaïc, en le lui présentant :

— Tenez, mon enfant, mangez ce gâteau de miel, que j’ai fait moi-même exprès pour vous.

Annaïc prit le gâteau et le mangea, sans défiance et avec plaisir, persuadée que c’était enfin une marque d’affection de sa marâtre. Mais, peu après, son ventre se gonfla tellement que tous ceux qui la voyaient la croyaient enceinte, et la pauvre fille en était tout honteuse et ne savait qu’en penser.

— Je vous avais averti, disait alors la marâtre triomphante au père, que votre fille se conduisait mal ; voyez dans quel état elle est !

Alors, le père mit Annaïc dans un tonneau, et l’exposa sur la mer, à la grâce de Dieu. Le tonneau alla se briser sur des rochers. Annaïc en sortit, sans mal, et se trouva dans une île aride et qu’elle crut déserte. Elle se retira dans une grotte souterraine, creusée dans la falaise, et fut étonnée d’y trouver une petite chambre, toute meublée, avec un lit, quelques vases de terre grossiers, et du feu au foyer. Elle pensa qu’elle devait être habitée ; mais, après avoir attendu longtemps, comme personne ne se montrait, elle se coucha dans le lit et dormit tranquille.