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— Je ne rabattrai pas d’un liard.

— Eh bien ! votre bœuf vous restera, et voilà tout.

Tous les marchands et les bouchers avaient visité et tâté le bœuf et fait leurs offres, et comme le vieillard en demandait toujours deux cents écus, sans en rien rabattre, ils s’en allaient ailleurs.

A^ers la fin de la foire, au moment où le soleil allait se coucher, un marchand inconnu, aux cheveux rouges comme flamme et aux yeux vifs et perçants, s’approcha aussi, considéra le bœuf et demanda :

— Combien le bœuf, bonhomme ?

— Deux cents écus et la corde à moi.

— C’est bien cher ; mais, l’animal me plaît, j’en ai besoin et voici les deux cents écus. Donnez-moi la corde, que je l’emmène.

— Non, je vous ai dit que je gardais la corde.

— Mais, la corde se donne toujours avec la bête vendue, vieil imbécile.

— Je ne donnerai pas la corde, vous dis-je, et si cela ne vous convient pas, rien n’est fait ; vous garderez votre argent et moi, je garderai mon bœuf.

— Eh bien ! va-t-en au diable, alors, avec ta corde, et qu’elle serve à te pendre !

Et il s’en alla.

Le bœuf fut vendu à un boucher de Morlaix, qui l’emmena avec lui et le mit dans son étable.