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LES DEUX FILS DU PÊCHEUR.


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Une fois il y avait, une fois il y aura, —
Pour donner carrière à tous les contes[1]. —

Il y avait une fois un vieux Pêcheur dont la femme était enceinte. Un soir il revint à la maison, n’ayant rien pris. Mais sa femme avait envie de manger du poisson, et il lui fallut retourner tout de suite au rivage. Il jeta ses filets et amena un très-beau poisson. Il en était tout heureux : — À présent, du moins, se disait-il, ma femme me donnera un peu de paix. — Mais voilà qu’au moment où il voulut prendre le poisson, celui-ci se mit à parler, et lui dit : — Quand je serai mort, donnez ma chair à manger à votre femme ; mon cœur, avec l’eau où j’aurai été lavé, à votre jument ; et mes entrailles et mes poumons, à votre chienne.

Le vieux Pêcheur fut bien étonné d’entendre parler un poisson, comme un homme. Jamais il n’avait vu pareille chose. Il répondit : — Je le ferai. — Puis, il s’en revint à la maison.

En arrivant, il dit à sa femme : — C’est moi qui ai pris un beau poisson ! — Voyez, femme, comme il est beau et grand ! —

  1. C’est une des nombreuses formules usitées pour entrer en matière : Chaque conteur a ordinairement la sienne, et souvent plusieurs, suivant la nature des récits. —