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La paix est rétablie. Le bachelier débarque à Paris et accepte, pour augmenter ses ressources, une place de 1500 francs au ministère de la marine. Il frappe à la porte de Flaubert, qui a promis à sa chère Laure d’être son Mentor, et qui s’acquitte volontiers de cette tâche, car l’adolescent l’a conquis par sa simplicité et sa modestie. Guy s’installe en son emploi ; et il utilise les loisirs que lui accorde l’administration et le papier qu’elle lui confie à griffonner des sonnets. Il soumet le dimanche à son grand ami ses élucubrations de la semaine. Et le grand ami se transforme en pédagogue...

Son humeur était des plus sereines. Il se divertissait à faire des farces à ses collègues du ministère et, pour se délasser, il s’en allait tirer l’aviron entre Chatou et Maisons-Laffitte.

— Je ne sais pourquoi on a prétendu que mon fils était pessimiste. On s’est obstiné à le contempler à travers ses œuvres, dont quelques-unes respirent, en effet, la tristesse et le dégoût de l’humanité. Mais jusqu’aux dernières années de sa vie, c’était le plus joyeux garçon du monde, expansif, jovial, ardent à s’amuser. Son meilleur compagnon, son frère en canotage, M. Léon Fontaine, qui lui fut si dévoué, vous dira, comme moi, qu’aucun symptôme n’annonçait la catastrophe où sa raison a sombré. Il jouissait, au physique et au moral, d’un admirable équilibre. Et cela, voyez-vous, on ne saurait trop le répéter, dans l’intérêt de la vérité d’abord, et pour détruire une légende qui atteindrait ma chère Simone, la nièce