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LV
PRÉFACE

plan. Et c’est pourquoi Lucrèce est un des maîtres de la pensée ; c’est pourquoi nous rendons hommage, autant qu’il est en nous, à cette raison vigoureuse et à ce mâle génie, à cette clarté d’exposition qui ne refroidit jamais l’imagination grandiose et mélancolique de l’un des poëtes les plus complets dont puisse s’enorgueillir l’humanité.

Mais les passages que nous avons cités çà et là suffisent-ils à faire deviner la grandeur de cet artiste incomparable ? Signalerons-nous la majestueuse ordonnance du poëme : I, l’univers et les systèmes ; II, les atomes ; III, l’âme et la mort ; IV, les sens, les rêves et l’amour ; V, le monde et l’homme ; VI, les météores et les maladies ? Ou bien noterons-nous la noblesse et l’enthousiasme des cinq grandes expositions où Épicure est glorifié (I, II, III, V, VI) ? l’invocation à Vénus, la vision de la fin des mondes pleuvant en débris formidables ; le triomphe de Cybèle, la prosopopée de la Nature et la nécessité inéluctable de la mort ; les phénomènes de la vue et de l’ouïe, la peinture des songes et de l’amour ; le tableau du monde se débrouillant de lui-même, la naissance de l’homme et le développement des industries et des arts ; enfin l’origine du tonnerre et des trombes, les tremblements de terre et les volcans, les Avernes, la peste d’Athènes, tous autant de morceaux éclatants qu’on veut bien accepter pour classiques ?

Il faut lire et relire Lucrèce, pour comprendre et apprécier l’intime alliance de cette puissance critique et de cette poésie pleine de grâce et de force. Car