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DE LA NATURE DES CHOSES
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Chaque sens est en butte à des douleurs sans nombre.

Tout d’abord, on connaît certains arbres dont l’ombre,
Mauvaise à qui s’endort couché sur le gazon,
800Distille dans la tête un lancinant poison.
Sur le haut Hélicon pousse une fleur fatale :
Ne la respire pas ; c’est la mort qu’elle exhale.
Partout montent au jour, sous mille aspects divers,
Mille éléments des corps qui peuplent l’univers ;
La terre dont le sein les porte pêle-mêle
Garde en leurs composés leur force originelle.

Parfois l’homme couché qui respire en dormant
La vapeur de sa lampe éteinte, brusquement,
Comme frappé d’un mal stupéfiant, se pâme.
L’âcre castoréum est funeste à la femme
Surtout à certains jours que lui rend chaque mois.
Ses membres engourdis s’affaissent, et ses doigts
Tendres laissent couler leurs gracieux ouvrages.
Combien d’autres agents détendent nos rouages
Et vont opprimer l’âme au plus profond du corps !
Le bain après l’orgie a causé bien des morts ;
Que d’estomacs trop pleins au bord d’une piscine
Dans un peu d’eau trop chaude ont trouvé la ruine !
Que l’étouffante odeur du charbon, faute d’eau,
820Facilement pénètre et remplit le cerveau !
Lorsqu’à la fièvre ardente un malade est en proie,
Le seul fumet du vin comme un choc le foudroie.

La terre abonde en soufre et, de ses profondeurs,