Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
268
DE LA NATURE DES CHOSES

Pour grossir l’infini des mers ? moins qu’une goutte.
Voilà de quoi bannir la surprise et le doute.

En outre, le soleil boit l’onde. Nous voyons
Les tissus trempés d’eau séchés par ses rayons ;
Sa puissante chaleur au même instant visite
Les surfaces de mers sans nombre et sans limite.
Si peu qu’il en aspire en chaque région,
Sur un si vaste champ, l’évaporation
Totale se mesure à l’ampleur du volume.

Joins-y ce que le vent peut emporter d’écume
En balayant les flots ; dans une nuit souvent
640Les chemins inondés sont séchés par le vent,
Et la fange liquide en écorce est figée.
Songe aussi que les eaux dont la nue est chargée,
Qu’elle disperse en pluie au gré des aquilons,
Elle les prend aux mers pour les rendre aux sillons.
Combien n’en faut-il pas pour arroser le monde !

Enfin, le sol poreux en lacunes abonde.
Par le fond et les bords la terre étreint les mers ;
En épanchant ses eaux dans les gouffres amers,
Elle reçoit les leurs, les filtre et, toutes neuves,
Les ramène en arrière à la source des fleuves,
D’où leur flot pur reprend les chemins qu’à leur cours
Leurs pieds, cristal fluide, ont creusés pour toujours.

Nous passons aux volcans. Lorsque, par intervalle,
Des bouches de l’Etna tant de flamme s’exhale