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son sang. Et moi, enlevant dans un nuage le corps et les dépouilles intactes de la malheureuse guerrière, je les rendrai au tombeau de ses pères. » Elle dit, et la nymphe fendant les airs légers descend des cieux d’un vol bruyant, enveloppée d’un noir tourbillon.

Cependant la cavalerie troyenne et étrusque, partagée en escadrons et déployant ses lignes, s’avance vers les murs de Laurente : partout dans la plaine le coursier frémissant (11, 600) bondit, et, se tournant deçà et delà, se débat sous le frein qui le presse. Les champs se hérissent au loin du fer des lances, et étincellent des feux que jettent les pointes des armes. Messape, et Coras son frère, et la rapide cavalerie des Latins, soutenus des escadrons de la belliqueuse Camille, se présentent dans la plaine contre les Troyens : déjà les lances s’allongent, ramenées en arrière ; déjà on brandit les dards ; cavaliers et chevaux, tout frémit, tout s’enflamme. Déjà les deux armées, marchant l’une sur l’autre, s’étaient arrêtées à la portée du trait : soudain on s’élance à grands cris ; (11, 610) on emporte les coursiers frémissants ; des deux côtés fond une nuée de traits pressés comme la neige ; le ciel en est obscurci. Tyrrhénus et le bouillant Acontée, la lance en avant, courent les premiers l’un sur l’autre et s’entre-heurtent avec un bruit effroyable, rompant coursier contre coursier, poitrail contre poitrail ; Acontée, renversé comme la foudre qui tombe, ou comme la pierre lancée par la baliste, est jeté au loin et répand sa vie dans les airs. Tout à coup les escadrons latins, saisis d’épouvante, rejettent leurs boucliers sur leurs épaules, et tournent bride vers la ville. (11, 620) Les Troyens de les pousser, entraînés par leur chef Asylas : déjà même ils approchaient des portes de la ville, quand les Latins se ralliant poussent un grand cri, et retournent les molles bouches de leurs coursiers. Les Troyens de fuir à leur tour, et, donnant des rênes, de se replier sur le gros de leur armée. Ainsi la mer, dans le mouvement alterné de ses flots, tantôt se précipite vers la terre, jette par-dessus les rochers ses vagues écumantes, et les déroule sur la grève au loin inondée : tantôt, reculant d’une fuite aussi rapide, et ramenant dans son sein bouillonnant les rocs qu’elle a roulés sur la plage, elle retire du rivage son onde décroissante. Deux fois les Toscans poussent les Rutules jusque sous leurs murailles ; (11, 630) deux fois rejetés sur eux-mêmes, ils tournent le dos en couvrant leur retraite. Une troisième fois enfin on s’attaque, on se mêle, on choisit son ennemi. Alors ce ne sont plus que mourants qui gémissent, que torrents de sang qui inondent et les armes et les corps. Ce n’est plus qu’un horrible mélange de cavaliers et de chevaux massacrés et roulant dans la plaine ; alors le combat devient affreux. Orsilochus, voyant que Rémulus tremble de l’attaquer, lance un dard à son coursier, qu’il perce au-dessous de l’oreille. Le quadrupède altier se cabre sous le coup, se redresse en fureur, et, impatient de sa blessure, bat l’air de ses pieds. (11, 640) Rémulus renversé roule à terre. Catillus abat Iolas, et Herminius, tout fier qu’il est de son courage, de son vaste corps et de ses armes. Herminius à la blonde