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plus tristes, et plus vivants, ils sont plus douloureux. Cette femme étant deux fois jeune, et par l’âge et par ce sexe encore ignorant de lui-même, ne saura que plus tard en rester à la joie, c’est-à-dire à mi-côte. Mais il faut vénérer les jeunes. Être jeune, c’est entrer en douleur, c’est-à-dire en travail et c’est l’âge tors et maudit. Car, l’amour est un bagne à son commencement ; l’harmonisation d’amour est d’abord déchirante. Et nul n’a dit l’effort et la peine des êtres jeunes, faits pour l’amour, ou tout simplement la tragédie d’être jeune.

Lorsque Pierre a compris, il est tranquille, phénomène éminemment masculin. Et quand elle a compris elle s’ennuie. Et son ennui prend des couleurs de drame. Pierre, l’ami de ce couple en détresse, regarde cette femme. Il voit ce front si frais buté à la sagesse. La très jeune femme est grave comme un augure, ce qui retarde tout. La blague à elle seule, cet esprit bête et godiche de notre race serait plus prompte à rendre heureux, mais c’est l’esprit des quarante ans. La vraie jeunesse est toujours sombre comme la foi.

(Extrait du « Couple »)

Ceci encore, qui est peut-être l’explication de toute la littérature féminine :

« Voici venir la longue théorie de celles qui, pour n’être pas incomprises, ont entrepris de se comprendre seules.