Page:Lubimoff - Le Professeur Charcot, étude scientifique et biologique.djvu/58

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 52 —

exigences légales de la corporation au milieu de laquelle il était appelé à servir, il était obligé de faire taire en lui la compassion et de mettre des bornes à sa liberté d’action.

On peut juger de son respect pour les principes de moralité et de la manière dont il se laissait guider par eux, par l’anecdote suivante qui à première vue, semblerait en contradiction avec ce qui a été dit plus haut sur ses qualités de famille. Très accueillant et hospitalier, M. Charcot réunissait tous les mardis à sa table ses amis et ses bonnes connaissances, ainsi que ses collègues. Un jour, à l’un de ces grands dîners, la conversation tomba sur un fait regrettable et indigne en tout cas d’une bonne camaraderie imputé à une célébrité médicale qui s’était toujours montrée hostile à M. Charcot. Sa femme était assise en face de lui, entre deux collègues de M. Charcot en science et en travail, qui s’étendaient sur le fait en question et soutenaient la conversation à ce sujet. Le maître de la maison avait inutilement essayé à plusieurs reprises d’en changer le cours. Lorsque enfin Mme Charcot, entraînée par l’exemple, émit aussi une opinion sévère, emporté par la vivacité et l’ardeur de son tempérament, son mari s’écria avec indignation, incapable de se contenir davantage : « Mais tais-toi donc : tu ne dois pas oublier que c’est mon collègue et que tu es obligée, avant tout, de le respecter. » Chacun comprit la signification morale cachée dans ces paroles et la conversation cessant sur ce sujet, prit une autre direction.