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pour tous les hommes jaillira de son cœur fermé jusque-là. Le véritable amour a toujours pour base le renoncement au bien individuel et le sentiment de bienveillance pour autrui qui en résulte. Le véritable amour peut nous procurer le bien véritable de la vie et résoudre la contradiction apparente entre l’être animal et la conscience réfléchie ; il peut satisfaire pleinement la nature raisonnable de l’homme.

L’amour n’est vraiment digne de ce nom que lorsqu’il est un sacrifice de soi-même. Et c’est parce que cet amour existe dans le cœur des hommes que le monde peut subsister. Le vrai amour est la vie même.

Nous ne pouvons concevoir la vie autrement que comme un certain rapport avec le monde, avec l’Infini ; c’est ainsi que nous devons la concevoir en nous-mêmes et dans les autres êtres. L’homme dont la vie repose sur la soumission à la loi de raison et sur la manifestation de l’amour, voit dans sa vie, d’un côté, les rayons de lumière de ce nouveau centre de vie vers lequel il se dirige, et de l’autre, l’action que cette lumière, en passant par lui, exerce sur ceux qui l’entourent ; et cela lui donne une foi inébranlable dans la stabilité, l’immortalité et l’éternel accroissement de la vie. La foi dans l’immortalité ne peut être reçue de personne ; on ne peut se convaincre soi-même de l’immortalité. Pour que cette foi existe, il faut l’immortalité et pour que l’immortalité existe, il faut comprendre ce qui rend notre vie immortelle. Pour croire à cette immortalité, il est indispensable d’avoir accompli sa tâche de vie. Cette immortalité de l’individu s’obtient par la communion des individus dans le Bien et dans l’Amour.