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besoin et gardons-le du mal; en un un mot : aimons-le comme nous-mêmes". »

Le mot prochain, dans le judaïsme, ne veut pas dire seulement un ami ou un parent, mais aussi l'étranger, qui se rapproche de nous par les liens de tendresse et qui devient ainsi notre prochain. Le verset du Nouveau Testament : « Vous avez entendu qu'il a été dit : Tu aimeras ton prochain comme toi- même et tu haïras ton ennemi? », est sans fonde- ment. Cette maxime ne se trouve ni dans la Bible, ni chez les Prophètes, ni dans le Talmud!

Hillel, l’un des plus grands philosophes juifs, qui vivait vers l'an 50 avant Jésus, reçut un jour la visite d’un païen qui désirait apprendre sans beau- coup de peine la loi mosaïque. Il s’adressa donc au sage et lui demanda plaisamment s’il pouvait lui enseigner la doctrine juive tout entière, pendant qu’il se tiendrait sur un pied. « Certainement répon- dit Hillel, car toute notre religion est résumée dans ces paroles : Tu aimeras ton prochain comme toi- même. Tout le reste, continua le philosophe, n’est que l’explicatien de ce texte ; allez, et méditez-le ?. »

Quant à la morale de l'Evangile et à la conception de la non-résistance au mal par le mal, nous les retrouvons chez les nombreux prédécesseurs de Jésus, chez le grand philosophe et législateur qu’est Moïse, chez Philon le Juif, « ce vrai juif militant*, » qui ne

(1) Lév., x1x, 34.

(2) Mathieu, v, 43.

(3) Talmud. Sabbath, 31 av.

(4) Réthoré. Science des religions. Paris, 1894, p. 143.