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cherchent-ils des buts d’existence en dehors d’eux-mêmes : ils vivent pour leurs enfants, pour leur famille, pour le peuple, pour l’humanité, pour tout ce qui ne meurt pas avec la vie personnelle.

Au contraire, selon la doctrine hypocrite de l’Église chrétienne, la vie humaine, ce bien suprême que nous possédons, est représentée comme une petite partie de cette autre vie imaginaire, dont nous sommes privés pour un temps.

L’Église chrétienne nous dit que notre vie est une vie dégénérée, mauvaise, déchue, que notre tâche principale ne consiste pas à vivre cette vie mortelle d’une manière à la rendre éternelle dans les générations, comme chez les Hébreux ; non, l’Église chrétienne nous enseigne qu’après cette vie, qui n’est pas la véritable, commencera la vraie vie.

L’hypocrisie de cette mauvaise plaisanterie saute. aux yeux de tous ceux qui se donnent la peine d’y réfléchir. Elle a été inventée par ceux qui avaient le besoin de s’approprier tous les biens de la terre, elle est encore soutenue par ceux qui vivent du travail des autres, c’est-à-dire par l’Église et l’État.

Moïse comme Jésus ne parlent pas de la vie chimérique d’outre-tombe. Us supposent que tous les hommes comprennent que l’anéantissement de la vie personnelle est inévitable, et ils leur révèlent une vie impérissable : celle de l’humanité.

La croyance à une vie future est une conception très basse, fondée sur une idée confuse de la ressemblance du sommeil et de la mort, idée commune à tous les peuples sauvages. La doctrine hébraïque est au-dessus de cette conception. La vie éternelle se