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de reconnaître que la terre vue la veille était l’île de Lobos. Toutefois, comme notre latitude d’arrivée était trente-cinq degrés, seize minutes, vingt secondes, nous devions la prendre pour le cap Sainte-Marie, que des géographes placent par trente-cinq degrés, quinze minutes, tandis que sa latitude vraie est trente-quatre degrés, cinquante-cinq minutes. Je relève cette fausse position, parce qu’elle est dangereuse. Un vaisseau qui, cinglant par trente-cinq degrés, quinze minutes de latitude sud, croirait aller chercher le cap Sainte-Marie, courrait le risque de rencontrer le banc aux Anglais, avant que d’avoir reconnu aucune terre. Pourtant la sonde l’avertirait de l’approche du danger ; près du banc, on ne trouve que six à sept brasses d’eau. Le banc aux Français, qui n’est autre que le prolongement du cap Saint-Antoine, serait plus dangereux : lorsqu’on est prêt à donner sur la pointe septentrionale de ce banc, on trouve encore douze à quatorze brasses d’eau.

Les Maldonades sont les premières terres hautes qu’on voit sur la côte du nord, après être entré dans la rivière de la Plata, et presque les seules jusqu’à Montevideo. À l’est de ces montagnes, il y a un mouillage sur une côte très basse. C’est une anse en partie couverte par un îlot. Les Espagnols ont un bourg aux Maldonades, avec une garnison. On travaille depuis quelques années, dans ses environs, une mine d’or peu riche ; on y trouve aussi des pierres assez transparentes. À deux lieues dans l’intérieur, est une ville nouvellement bâtie, peuplée entièrement de Portugais déserteurs, et nommée Puéblo nuevo.

Le 31, à onze heures du matin, nous mouillâmes dans la baie de Montevideo, par quatre brasses d’eau, fond de vase molle et noire. Nous avions passé la nuit du 30 au 31 mouillés sur une ancre, par neuf brasses même fond, à quatre ou cinq lieues dans l’est de l’île de Flores. Les deux frégates espagnoles destinées à prendre possession des îles Malouines, étaient dans cette rade depuis un mois. Leur commandant, don Philippe Ruis Puente, capitaine de vaisseau, était nommé gouverneur de ces îles. Nous nous rendîmes ensemble à Buenos-Ayres, afin d’y concerter avec le gouverneur général, don