Page:Louis Antoine de Bougainville - Voyage de Bougainville autour du monde (années 1766, 1767, 1768 et 1769), raconté par lui-même, 1889.djvu/183

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moyen de quelques traverses fortement amarrées sur les deux bords. Par-dessus l’arrière de ces deux bâtiments ainsi joints, ils posent un pavillon d’une charpente très légère, couvert par un toit de roseaux. Cette chambre les met à l’abri de la pluie et du soleil, et leur fournit en même temps un lieu propre à tenir leurs provisions sèches. Ces doubles pirogues sont capables de contenir un grand nombre de personnes, et ne risquent jamais de chavirer. Ce sont celles dont nous avons toujours vu les chefs se servir ; elles vont, ainsi que les pirogues simples, à la rame et à la voile : les voiles sont composées de nattes étendues sur un carré de roseaux, dont un des angles est arrondi.


Pirogue double à Taïti.

Les Taïtiens n’ont d’autre outil pour tous ces ouvrages qu’une herminette, dont le tranchant est fait avec une pierre noire très dure. Elle est absolument de la même forme que celle de nos charpentiers, et ils s’en servent avec beaucoup d’adresse. Ils emploient pour percer les bois des morceaux de coquilles fort aigus.

La fabrique des étoffes singulières qui composent leurs vêtements n’est pas le moindre de leurs arts. Elles sont tissues avec l’écorce d’un arbuste que tous les habitants cultivent autour de leurs maisons. Un morceau de bois dur, équarri et rayé sur ses quatre faces par des traits de différentes grosseurs, leur sert à battre cette écorce sur une planche très unie. Ils y jettent un peu d’eau en la battant, et ils