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trop longtemps et une vie nouvelle s’ouvrit à ma convalescence morale.

(Connaissez-vous, au musée de Madrid une singulière toile de Goya, la première à gauche en entrant dans la salle du dernier étage ? Quatre femmes en jupe espagnole, sur une pelouse de jardin, tendent un châle par les quatre bouts, et y font sauter en riant un pantin grand comme un homme…)

Bref, nous revînmes à Séville.

Elle avait repris sa voix railleuse et son sourire particulier ; mais je ne me sentais plus inquiet. Un proverbe espagnol nous dit : « La femme, comme la chatte, est à qui la soigne. » Je la soignais si bien, et j’étais si heureux qu’elle laissât faire !

J’étais arrivé à me convaincre que son chemin vers moi n’avait jamais dévié ; qu’elle m’avait réellement abordé la première et séduit peu à peu ; que ses deux fuites étaient justifiées non pas par les misérables calculs dont j’avais eu le soupçon, mais par ma faute,