Page:Louÿs - Douze douzains de dialogues ou Petites scènes amoureuses, 1995.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
67

IX

LA CONFESSION INTERROMPUE

« Ça c’est rien à côté de ce qui m’est arrivé une fois dans l’église de Bougival.

— Dans l’église ?

— Tu vas voir. J’avais onze ans, j’étais au catéchisme. Le curé m’avait dit de venir me confesser un lundi à 1 heure… À cette heure-là y a personne dans l’église. Je viens, je me mets à genoux, je dis le Je me confesse à Dieu et tout le boniment, pis je commence à déballer mes petits péchés, que je suçais la pine à tout le monde…

— À onze ans ? tu t’y es pris de bonne heure !

— Quoi, y a pas de mal, j’avais mon pucelage. Alors y me demande si j’aime ça, j’y dis qu’oui. Y demande si j’avale, j’y dis qu’oui. Et tout d’un coup, v’là t’y pas qui passe sa queue par le grillage et qui m’dit : “Montre comment qu’tu fais.”

— Ben, merde, il n’avait pas la trouille.

— Moi, je m’en foutais ; quand j’ai eu la queue, je l’ai gobée. Mais ma chère, si t’avais vu l’coup ! V’là t’y pas qu’il bande, qu’il se gonfle, et le grillage était trop étroit ! Il pouvait plus décharger ni retirer sa pine, ni débander, ni rien ! “Ôte ta bouche, qu’il disait, ne suce plus !” Moi, j’rigolais ! Plus qu’il se tortillait derrière la grille plus que j’pompais par-devant… Heureusement pour lui que le grillage était en bois. Il l’a cassé avec ses mains, et alors… ah ! nom de Dieu c’qu’il m’en a pissé dans la bouche ! Moitié foutre et moitié sang ! »