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I

CHACUNE SON TOUR

« Loute, viens ici, j’ai quelque chose à te dire.

— Oui, oui, je sais ce que c’est.

— Alors, si tu sais ce que c’est, raison de plus ; mais je parie que tu ne le sais pas.

— Quand nous causons toutes les deux, c’est toujours mon doigt qui parle et ton bouton qui écoute.

— Eh bien ?

— Eh bien ! ce soir c’est tout le contraire. Mon doigt n’a rien à te répondre et mon bouton meurt d’envie de t’entendre.

— Petite masque ! et moi qui te croyais froide !

— Je l’ai été. Mais si tu crois que tu ne m’excites pas, à bâiller du ventre tous les jours devant moi.

— La putain ! la voilà qui relève ses jupes aussi !

— Tiens ! pourquoi pas !

— Allons ! couche-toi sur le dos, saleté ! Vois comme je suis gentille, je fais tout ce que tu veux.

— Il ne manquerait plus que cela !

— Je ne me trompe pas de place ?

— Ah ! ma chérie ! non, tu ne te trompes pas… va doucement, doucement… Fais m’en pisser beaucoup… »

6 mai 1897.