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perdu, languissant ou mobile, selon qu’Aimery écartait ou pressait tour à tour la tête inerte et enflammée.


Une cloche tinta…

« Qu’est-ce encore ? » dit Psyché inquiète.

Cette cloche la rappelait tout à coup aux réalités de l’existence. Le déjeuner était servi. Elle revint à elle en ouvrant plusieurs fois les paupières comme une rêveuse qui s’éveille. Elle se souvint peu à peu qu’elle arrivait d’un long voyage, et se mit à poser des questions d’une voix encore égarée.

Où étaient ses malles ? Elles ne seraient là que dans trois heures. Sa chambre ? Celle-ci. La chambre d’Aimery ? Un peu plus loin. Elle parcourut nonchalamment des cabinets de toilette et des salles de bain qui lui plurent, ainsi qu’un petit boudoir-bibliothèque dont elle fit mentalement sa pièce d’élection. Puis, la cloche ayant sonné pour la seconde fois, Psyché découvrit qu’elle avait faim.

Ils descendirent ensemble le grand escalier. Ni dans les corridors, ni dans la salle à manger, aucun domestique n’apparaissait. Elle demanda :

« Êtes-vous servi par des esprits ?

— Je vous ai dit que le pays était enchanté.

— Dites un mot de plus et je vous crois.

— La maison est presque inhabitée. Je n’y laisse que deux jardiniers et un ménage de portiers sont d’anciens domestiques et pourront vous servir,