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LA SIRÈNE



Non ! Les temps sont passés des croyances profondes :
Le vent religieux ne souffle plus sur nous ;
Nos yeux ont pénétré le ciel peuplé de mondes,
Et nous le regardons sans fléchir les genoux.

Nous avons déchiré leur firmament de toile
Déployé, disaient-ils, sous les pieds de leur Dieu ;
Et nous n’avons trouvé, plus haut que les étoiles,
Que d’autres univers éperdus dans le bleu.

À l’horizon : l’espace. Au zénith : pas de voûte.
Quand nous penchions nos corps dans le gouffre profond,
À notre âme hagarde et qui frissonnait toute
Nous pouvions deviner qu’il n’avait pas de fond.

Mais nous avions besoin de croire à quelque chose,
Et pour notre Maïa nous avons adopté
L’existence éternelle et l’éternelle cause,
La Forme, l’Idéal, la Beauté, la Beauté !