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des lacs ; un paysage d’un vert très frais, analogue, dit M. de Launay, à celui des montagnes de France : des chênes, des peupliers longs, des noyers çà et là, des haies de mûriers sauvages, des forêts dont le sol est couvert par un tapis d’anémones rouges ; puis, en descendant vers la mer, des fleurs de toutes nuances, des épis, des pâturages et d’innombrables oliviers : tel est le pays de Sapho. Sur les plages, on trouve le murex, le coquillage de la pourpre.

Le costume des femmes est d’un éclat tout asiatique ; il se compose d’une culotte bouffante, serrée à la cheville, d’une chemisette blanche à raies roses et d’un boléro très ouvert qui laisse la poitrine libre dans la mince étoffe. Les cheveux sont ornés d’un mouchoir de couleur qui fait parfois le tour du visage ; on y pique des aigrettes, des fleurs, des mousselines transparentes ou des rubans multicolores, selon les villages. Les jeunes filles sont très fières de leurs cheveux noirs, qu’elles portent en nattes tombantes. Plus les nattes sont longues, plus les filles se disent belles, et une vieille superstition veut que la veille du premier mai elles frappent leurs dos nus avec des orties pour faire pousser leur chevelure.

Chaque année, ce jour-là aussi, elles s’en vont, par groupes d’amies, le soir, en chantant, dans la campagne nocturne. Elles cueillent autant de fleurs qu’elles en peuvent rapporter, et celle qui