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seurs et vaudraient leurs remplaçants. On perdrait son temps à vouloir réformer une institution qui est traditionnellement incompétente et malfaisante. La Censure royale a combattu Molière, Racine, Sedaine et Beaumarchais. La Révolution interdit Horace, Andromaque, Phèdre, Macbeth, Henri VIII et brûle la partition de Richard Cœur de Lion, suspecte de royalisme. Dès la Renaissance romantique on arrête Marion Delorme, le Roi s’amuse et même Hernani, dont l’interdiction n’est levée que sur un ordre formel du roi. On persécute le Chevalier de Maison-Rouge, les Effrontés, les Lionnes pauvres, Diane de Lys et la Dame aux Camélias. Depuis moins d’un siècle, la Censure s’est battue contre Victor Hugo, Dumas père, Dumas fils, Émile Augier, Ponsard (Ponsard lui-même !), Legouvé, Balzac, Déroulède, Erckmann-Chatrian, Meilhac et Halévy, Jules Claretie, Victorien Sardou, Paul Adam, Edmond Haraucourt ; — voilà ceux contre qui la Censure fait usage des armes qu’on lui a données.

Depuis son origine jusqu’à l’heure actuelle, son histoire n’est qu’une lutte acharnée contre les meilleurs de nos écrivains. Parmi ceux que je viens de citer, tous les morts ont déjà leur statue. Ils sont vengés, dira-t-on ? Il est bien temps ! Que savons-nous si les tracasseries, si les persécutions qui les arrêtèrent n’ont pas