Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 10.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

 Si tous les gars du monde voulaient bien êt’marins, ils f’raient avec leurs barques un joli pont sur l’onde.
 Alors on pourrait faire une ronde autour du monde si tous les gens du monde voulaient s’donner la main.


M. Paul Fort, certes, aurait pu offrir ces trois petites strophes à M. Basset, à M. Doncieux, à M. Pineau, à nos plus distingués folkloristes, je ne crois pas qu’aucun d’eux eût émis des doutes sur leur authenticité. Elles sont anonymes comme la Chanson de Renaud. Elles ont la grâce supérieure des poèmes qui sont nés de la terre comme des fleurs spontanées.

Il y a dans un sonnet de Rossetti, le symbole adorable d’une vision qui s’unit au visionnaire sous le lien irréel et souverain d’une seule auréole couronnant deux têtes aimantes. Ainsi M. Paul Fort a uni pour toujours dans le champ de ses prédilections l’idée de Femme et l’idée de Nature, qui se confondent l’une et l’autre en lui. Un seul objet l’attire et le retient, a cette double apparence. Il voit la Nature sous des traits féminins, pleine de regards, de chairs et de baisers ; il chante la Femme avec les épithètes qui sont celles des prés, des eaux et des forêts.


 À fleur de tes doigts, dit-il, la lune au baiser bleu pose ses lèvres tièdes.


Ailleurs


 Sors de l’enclos. Viens rire entre les saules clairs et