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heurte Cléonte contre Harpagon. Il s’admire d’en être ému. Goethe s’abaissait devant elle et disait, quand il l’avait relue : « Nous autres petits hommes… » Prononcé de Gœthe. Le moliériste, plus il déifie le Verbe de Mascarille et plus il croit être lui-même, — non certes pas un laquais, mais un homme de qualité. Le moliériste, fût-il laquais, sait tout sans avoir rien appris. Le moliériste, en présence d’un texte où il est question de Molière, procède exactement comme un historien. Il se demande si le texte est faux ou vrai. Mais la rapidité de sa méthode nous fait envie. Elle est éblouissante. Auparavant qu’elle cherche, elle trouve. Le témoin est à décharge ? donc il dit la vérité. À charge, il ment. L’argument qui récuse le témoin à charge est toujours le même : « L’histoire est fausse puisqu’elle contrecarre tout ce que nous savons de Molière. » Le témoin est-il à charge et à décharge tout ensemble ? Cela n’est pas pour embarrasser un moliériste bien pensant. Les Aventures de monsieur Dassoucy ne bavent que d’infâmes calomnies chaque fois qu’elles ternissent Molière ; mais elles prouvent le peu que nous sachions sur les tournées moliéresques ; et là, tout à coup, par merveille, leur témoignage est inviolable. Le moliérisme se désigne lui-même sitôt qu’il est question d’histoire. Pendant une soirée exquise où une dame enchante quinze personnes par l’hommage qu’elle donne de tout cœur