Page:Loti - Un pèlerin d'Angkor, 1912.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

oppresse les poitrines ; l’air semble la vapeur de quelque chaudière où seraient mêlés des parfums et des pourritures.

Et c’est Saïgon, — une ville que je ne devais jamais voir, et dont le nom seul jadis me paraissait lugubre, parce que mon frère (mon aîné de quinze ans) était allé, comme tant d’autres de sa génération, y prendre les germes de la mort.

Aujourd’hui, il m’est depuis longtemps familier, ce Saïgon d’exil et de langueur ; je crois même que je ne le déteste plus. Quand j’y étais venu pour la première fois — déjà un peu sur le tard de ma vie — combien j’avais trouvé son accueil tristement étrange et hostile ! Mais je me suis fait à son ciel plombé, à l’exubérance de ses malsaines verdures, à la bizarrerie