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LE ROMAN D’UN ENFANT

avait poussé et s’était épanouie près de sa fenêtre, à l’intérieur même de sa maison tahitienne, qu’envahissaient les verdures admirables de là-bas. Oh ! avec quelle émotion singulière ; — quelle avidité, si je puis dire ainsi, — je la regardai et la touchai cette pervenche, qui était une petite partie encore colorée, encore presque vivante, de cette nature si lointaine et si inconnue…

Ensuite je la serrai, avec tant de précautions que je la possède encore.

Et, après bien des années, quand je vins faire un pèlerinage à cette case que mon frère avait habitée sur l’autre versant du monde, je vis qu’en effet le jardin ombreux d’alentour était tout rose de ces pervenches-là ; qu’elles franchissaient même le seuil de la porte et entraient, pour fleurir dans l’intérieur abandonné.